Histoire

Situation Géographique


Longue d'environ 35km, la vallée d'Aulps s'étend de Thonon-les-Bains au nord, à Morzine au sud. Elle communique par le haut avec le Valais suisse via le col de Coux, et avec Taninges, Cluses et Bonneville via le col des Gets. Creusée et modelée par les glaciers, les torrents glaciaires, puis par la Dranse, la vallée se resserre en deux endroits, deux verrous qui séparent deux bassins : le bassin inférieur entre le verrou du Jotty et celui des Tines, et le bassin supérieur au-delà des Tines. Le verrou des Tines est très étroit et a nécessité le creusement d'un tunnel pour permettre le passage de la route à la fin du 19ème siècle. Avant cela, le bassin supérieur était isolé, peu peuplé à cause de la rigueur du climat, et ses habitants entretenaient plus de relations avec Taninges et le Valais suisse qu'avec Thonon-les-Bains. Après l'aménagement de la route et grâce au développement du tourisme, la situation s'est inversée : on constate que la population et les activités économiques se concentrent essentiellement sur le haut de la vallée.

Histoire de la Vallée d'Aulps

Durant les périodes de la pierre et du bronze, ainsi que pendant les deux époques lacustres, les vallées du Haut Chablais furent inhabitées et il semble qu’il en fut ainsi jusqu’au VIème siècle. Suite au partage des terres des hautes vallées et montagnes par les chefs Burgondes établis dans le Bas Chablais, le seigneur du Castrum d’Allinges se retrouve propriétaire d’une partie de la vallée d’Aulps ; le chef de la villa gallo-romaine Ravorée, lui, se retrouve propriétaire de Evorée (Avoriaz).

Les Francs, victorieux des Burgondes en 534, s’octroient la propriété des sols, et font fuir les indigènes dans les montagnes désertes, ces derniers cherchant à échapper à l’esclavage et à la condition serve.

Ces indigènes, composés des Burgondes d’Allinges, de ceux de Ravorée et d’autres encore peuplent en premier les vallées supérieures de la Dranse, au milieu du VIème siècle. Puis, plus tard, au XI° siècle, la vallée passe sous l’autorité des Révérends Abbés d’Aulps. Malgré l’« importation » de serfs de Bretagne par le monastère, la population Burgonde résiste à son autorité ; c’est ainsi que les habitants de Chéravaux (plus tard une partie de Montriond) demandent à se détacher de la juridiction des moines pour se placer sous la sauvegarde du Baron du Faucigny.

L’affranchissement tant souhaité par ces trois communautés de Saint Jean, Morzine et Montriond n’intervient qu’en 1770 après nombre de procès, tractations et accords. Au XVIe siècle, l’actuelle commune de Montriond était alors constituée de trois hameaux : Chéravaux, l’Elex et Mont-Riond où fut érigée en 1534 une chapelle. Au sortir du XVIIe siècle, la situation économique de la Vallée d’Aulps, comme les autres vallées du Haut Chablais, était fort critique. Les habitants, isolément ou par petits groupes, émigraient vers des régions économiquement plus riches (Alsace, Palatina, Belgique, Paris, Genève...) ou en voie de développement (Argentine...).

Ainsi, vers 1750, un quart de la population mâle s’expatriait, au moins temporairement.

Les alpages


Traditionnellement agricole, c'est dans un texte de l'abbaye cistercienne Sainte-Marie-d'Aulps que la vallée apparaît dans l'histoire sous le nom latin alpibus qui signifie alpage, ce qui reflète l'importance de l'exploitation des pâturages d'altitude depuis des temps immémoriaux.


L'estive

Les Meurians (habitants de Montriond) emmenaient pâturer leur bêtes aux Albertans. L'emmontagnée (nommée aussi estive ou inalpage) se faisait au lendemain de la foire de Montriond (le 8 juin).On montait en char à échelles tiré par le cheval ou à pied. On montait même les bébés bien calés dans une hotte. L'alpage était constitué de pâturages communaux où les vaches de chaque paysan étaient mélangées. Mais chaque famille produisait sa tomme et son beurre, et rentrait ses vaches à l'écurie toutes les nuits. Ces alpages intermédiaires étaient nommés "les milieux". L'herbe ayant été brouté ou engrangée, hommes et animaux montaient plus haut encore pour passer le plus chaud de la saison.

Ces alpages itinérants sont appelés des remues.

Les alpages étant une source de richesse, leur exploitation était gérée par des règlements complexes et très stricts. Au Moyen Age, ils appartenaient pratiquement tous à des seigneurs ou à des religieux qui les louaient aux villageois. Ces baux de location sont restés longtemps (et restent encore parfois) en vigueur, et l'on comprend les conflits, notamment concernant les limites des pâturages, qui ont opposé des villages voisins, voire même deux communautés de paysans d'un même village.

Grande et petite montagne

Les grandes montagnes sont des alpages communautaires regroupant plusieurs centaines de bêtes appartenant à différents propriétaires. Contrairement aux petites montagnes qui désignent des alpages familiaux. Dans les grandes montagnes, on embauchait des bergers, un fruitier, un séracier (pour fabriquer le sérac, fromage maigre confectionné à partir du petit lait), un pachonnier qui déplaçait tous les 3 ou 4 jours les piquets (pachons) auxquels on attachait les vaches pour la nuit et qui étendait le fumier dans les champs, et un muletier chargé de monter les provisions, le bois de chauffage et de descendre les fromages.

La fenaison


luge à foin tirée par un cheval

Les paysans profitaient des estives pour faire les foins, allant le chercher parfois au-dessus des alpages. Certains, retenus par une corde, allaient faucher dans des endroits pentus au péril de leur vie. A cause de la pente, on ne pouvait couper les foins qu'à la faux, tôt le matin pour que l'herbe pleine de rosée ne se courbe pas sous la lame. Le foin était étalé pour le faire sécher, puis transporté à l'aide de la luge ou du char à échelle, ou bien on réalisait une trousse ou un ran, sorte de ballot de 80 kg de foin serré dans une toile ou par des cordes, que l'on portait à dos d'homme ou que l'on faisait rouler dans la pente. Enfin, lorsque les premiers froids se faisaient sentir, ils redescendaient aux Albertans ; profitant des regains, la fenaison s'effectuait une seconde fois, engrangeant encore un peu de nourriture à bestiaux pour les mois hivernaux avant de rejoindre Montriond.

Ensuite, durant l'hiver, une fois les granges de Montriond vides, les paysans montaient aux Albertans, puis plus haut, chercher les réserves de foin à l'aide de luges spéciales appelées "luges à foin", sortes de traîneaux aux patins très espacés, tirés par un mulet sur le plat, mais retenus de mains d'homme sur les pentes.

Description d'un chalet traditionnel des Albertans

On entrait par une porte basse dans la cuisine. La table où l'on mangeait se relevait en s'accrochait contre la paroi. L'âtre trônait dans un coin de la pièce. La quemacle (crémaillère) permettait d'amener ou de retirer du feu le gros chaudron de cuivre où chauffait le lait.

Contiguë à la cuisine, une petite chambre profitait de la chaleur de l'âtre durant les nuits fraîches.

De l'autre côté de la paroi, sur toute la longueur du chalet, était l'étable dans laquelle on installait les bêtes la nuit, et dans laquelle on pénétrait soit par une petite ouverture donnant dans la cuisine, soit par une porte d'étable donnant sur l'extérieur du même côté que la porte d'entrée.

Enfin, à l'étage, s'étendant sur toute la surface du chalet, le fenil s'ouvrait sur un plan incliné qui permettait de monter les tousses (ou rans, sortent de ballots de foins) ou de faire glisser les luges à foins.

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